mardi 13 octobre 2009

Echo And the Bunnymen - The Fountain (2009, Warner)

Après un Siberia plutôt bon, qui marquait donc un retour assez convaincant de la formation liverpuldienne, Echo And The Bunnymen réapparait avec ce nouvel album d'obédience pop-rock, sur lequel ne subsistent que peu de traces des élans cold qui pouvaient caractériser Crocodiles ou Porcupine.

Une intervention inattendue et dont on peut craindre le pire en termes de résultat, celle de Chris Martin, lance l'album...de belle manière, sur ce Think I need it too énergique et rock, tout en exhalant une sensibilité pop bienvenue. Passé ce "test" déterminant, Ian Mc Culloch et son groupe confirment avec un Forgotten Fields aux guitares à la fois enjôleuses et appuyées, plus saccadé que le morceau introductif mais tout de même concluant. Les choses semblent alors s'annoncer sous les meilleures auspices, d'autant qu'un Do you know who I am? rapide et percutant fait de ce premier tiers d'album une entrée en matière sans fautes, Shroud of Turin confirmant ensuite ceci avec ses mélodies pop scintillantes bousculées par des guitares vivifiantes aux motifs marquants. Bonne impression encore à l'écoute de Life of 1.000 crimes, même si on ne peut s'empêcher de se dire que Sergeant and Co pourraient élaborer quelque chose de plus significatif, moins communément pop-rock. Ce petit regret subsiste au moment d'aborder The Fountain, certes bon mais au format un poil trop lisse. Le groupe réussit certes ce qu'il entreprend, mais connaissant ses possibilités, on reste sur notre faim et on attend de lui une réussite intégrale, et plus d'initiatives, plutôt qu'un disque uniquement porteur de trois ou quatre titres indispensables. Everlasting neverendless efface un peu ce ressenti en affichant une belle énergie, toujours conjugués avec bonheur à des inflexions pop bien ficelées, sans qu'on ne parvienne, cependant, à se défaire de l'idée qu' Echo And The Bunnymen est capable d'allier à cette pop-rock attrayante des orientations "autres", peut-être plus en lien avec les albums cités en début d'article. Proxy, le titre suivant et aussi bon qu'il soit, confirme mes dires, de même que Drivetime dont le niveau élevé permet heureusement de rendre le disque assez bon pour qu'on l'accepte tel qu'il est, sans cette pointe de nostalgie ou d'exigeances trop poussées. Puis Idolness of gods, posé, met fin de façon (trop?) apaisée, pas vraiment éloquente, à un bon opus.

Subsiste alors une interrogation; aussi valeureux soit-il, The Fountain s'avèrera t-il durable, ou sera t-il l'album de quelques semaines, dans l'attente de travaux à suivre plus poussés et moins timorés? La réponse est pour l'heure difficile à donner et pour le moment, profitons sans modération du bon nombre de réussites qu'inclut l'opus en présence.
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TRACKLISTING:
1. Think I Need It Too
2. Forgotten Fields
3. Do You Know Who I Am
4. Shroud Of Turin
5. Life of 1,000 Crimes
6. The Fountain
7. Everlasting Neverendless
8. Proxy
9. Drivetime
10. The Idolness Of Gods

Myspace ECHO AND THE BUNNYMEN

lundi 12 octobre 2009

Jay Reatard - Matador singles '08 (2008, Matador)

C'est avec ce recueil de singles (issu de chez Matador, ce qui constitue déjà un sérieux gage de crédibilité) que JAY REATARD, grand enfant capable de trousser un titre détonnant entre l'apéro et l'entrée, s'est fait connaitre. En l'espace de quelques jours, son nom était non pas sur toutes les lèvres, mais au minimum sur celles du public averti. Ceci pousse pour le moins à la curiosité, en même temps que point ce scepticisme lié à tout "buzz" soudain autour d'un artiste.

Eh bien dans le cas qui nous intéresse, on ne peut que constater que celui qui entoura la sortie de cette compilation est entièrement justifié. En pleine époque dévolue aux revivals, Jay Reatard insuffle avec ce disque une belle bouffée de fraicheur, de spontanéité noisy 90's, nous ramenant à un temps ou le rock se voulait cru, souvent rythmé et porteur de mélodies marquantes, la plupart du temps englouties dans le flot d'une lo-fi, ou d'une noisy-pop, délectable et brouillonne sans toutefois se montrer indigeste. Et sur les treize titres de ce disque, aucune faute de goût n'est à déplorer, celui-ci ressemblant à un panorama séduisant de ces regrettées 90's.

Partant de formats courts, Jay nous aiguille d'entrée sur la bonne voie avec See Saw, aux élans évoquant I Should Coco des Supergrass, tant sur le plan vocal qu'au niveau des mélodies, et sonore avec un son à peine dégrossi qui sied à merveille au registre du bonhomme. Ca continue ensuite avec Screaming Hand, ses guitares excitées et sa rythmique agitée, puis sur l'album en entier, Jay ayant de plus le bon goût de reprendre le Fluorescent Grey de Deerhunter. Entre Painted Shut, fait d'une pop vive, à I'm Watching You, lancinant et décoré par des motifs sonores cette fois posés, le sauvageon inspiré fait preuve d'une verve et d'une inspiration qui laissent d'ores et déjà augurer du meilleur en termes de carrière et de productions futures, ceci nous réjouissant d'autant plus au vu de la productivité de notre ami. Ce dernier peut faire dans une acoustique débridée (An Ugly Death) pour ensuite s'embarquer dans une échappée noisy/lo-fi remuante (Always Wanting More) et jouer, suite à cela, une pop à la Supergrass, influence évidente au même titre que Sebadoh et les Pixies, et plus globalement les années 90, sur You Mean Nothing To Me. On appréciera donc grandement l'immédiateté de ses morceaux, ses guitares de caractère (Trapped Here, remarquable) et son chant nasillard, semblable par sa tonalité à celui d'un ado à peine sorti des affres de l'état prè-adulte. Ses chansons les plus courtes, tel ce Hiding Hole et ce D.O.A. furibards, le second dans un esprit punk affirmé, s'avèrent irrésistibles. Et comme le gaillard sait aussi s'y prendre dans un domaine acoustique proche du Sebadoh le plus assagi qui soit (No Time, You Were Sleeping), le tableau final est d'autant plus attrayant, et cet album s'impose comme l'une des grosses surprises de l'année 2008, et tout simplement comme une acquisition impérative pour tout amateur de rock éruptif et pleinement 90's. Ce que confirmera d'ailleurs l'excellent Watch Me Fall, sorti récemment et qui inclut lui aussi sa fournée de morceaux incontournables et turbulents.
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TRACKLISTING:
01. See Saw
02. Screaming Hand
03. Painted Shut
04. Ugly Death
05. Always Wanting More
06. You Mean Nothing to Me
07. Fluorescent Grey (Deerhunter)
08. Trapped Here
09. Hiding Hole
10. DOA
11. No Time
12. You Were Sleeping
13. I'm Watching You

Myspace JAY REATARD

Site JAY REATARD

dimanche 11 octobre 2009

(swell) - South of the rain and snow (2008, Talitres)

Exit Monte Vallier et Sean Kirkpatrick, c'est maintenant David Freel qui officie, seul, aux commandes de Swell, "rebaptisé" (swell). Auteur d'albums magiques, et majeurs au folk ombrageux et électrifié selon un dosage juste (Well?, 41, For All The Beautiful People, pour n'en citer que trois), Freel n'a pas perdu la main, loin s'en faut, suite au départ de ses acolytes, et signe là un album magnifique, frappé du sceau d'une mélancolie peut-être plus accentuée encore qu'au temps du trio.

Le très pur Kicking All Them Ghosts, dont l'intitulé suffit à lui seul à nous saisir l'état d'esprit de son auteur, débute d'ailleurs dans le plus simple appareil; guitare sèche et voix, tranquille et épurée, doublée de choeurs sobres, pour une introduction tout en douceur. Sur la suite, le désabus de David prend une tournure un peu plus étayée, bien que restant très mesurée. Trouble Loves You, second morceau, amenant un rythme doux mais régulier, la superbe voix faisant le reste, accompagnée par cette guitare céleste et l'orgue de Nick Lucero qui joue aussi de la batterie pour les besoins de cet album. D'un état d'esprit sombre, Freel réalise en mise en son superbe et plus qu'intéressante, jouant son folk/rock en le revêtant de beaux apparats, simples et pourtant décisifs quant à la magie qui émane de l'album en question. Le troisième morceau, Saved By Summer, en est le parfait exemple, avec, toujours, des guitares fines et remarquables, l'orgue planant et ce rythme de batterie dont le côté désinvolte cache la qualité de l'intervention.
De motifs sonores presque effacés (la guitare de Comes Right Here), SWELL fait un argument déterminant, et sur certaines chansons, il rend sa musique plus vivace, plus ouvertement électrifiée, ce qui débouche sur de superbes travaux comme Our Aquarium. Cette option s'affirme d'ailleurs ensuite, sur South Of the Rain And Snow par exemple qui est aussi l'un des plus longs formats du disque. La guitare se fait plus mordante, tout en gardant son côté délicat, Freel ne se départissant qu'à peine de sa mélancolie. Celle-ci, il faut le dire, lui sied à merveille et "éclaire", si l'on peut dire, les morceaux de ce superbe opus. Et quand les élans plus modérés, quasiment à nu, de SWELL, reprennent le dessus (Good Good Good), le charme reste le même. SWELL marche à la passion, se livre sans fard, et use donc d'une tristesse récurrente pour écrire et composer de superbes morceaux. Tell us All reflète bien cette sincérité et la "recette" de David Freel, et nous régale de guitares aux riffs noisy alliées à des accords nettement plus doux.
Aucune prise n'est offerte à la médiocrité et SWELL réussit tout ce qu'il entreprend, comme ce The Measure Of This Moment qui offre lui aussi de douces trainées noisy, puis pour finir, Waiting For A Beer, apaisé et qui permet à Freel de finir sur une note tout aussi cafardeuse, et captivante, que sur le restede son album .

SWELL livre donc avec ce South Of The Rain And Snow un disque de toute beauté, à l'image de The Lost Album, pour nous ramener aux plus beaux moments d'un Too Many Days Without Thinking et perpétuer l'enchantement, teinté de désabus, généré par chacune de ses productions discographiques.
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TRACKLISTING:
1. Kicking All Them Ghosts - 2. Trouble Loves You - 3. Saved By Summer - 4. Comes Right Here - 5. Our Aquarium - 6. South Of The Rain And Snow - 7. Good Good Good - 8. Tell Us All - 9. The Measure Of This Moment - 10. Waiting For A Beer

Myspace SWELL

Site SWELL

samedi 10 octobre 2009

Clinic - Visitations (2006, Domino Records)

Venu de Liverpool, CLINIC propose depuis plusieurs albums un rock à la coloration post-punk assez obscure, élaborant une sorte de trame noisy sur fond de vocaux évoquant un Thom Yorke un peu moins porté vers l'introspection, sortant de sa torpeur et chantant en parfaite adéquation avec les ambiances tissées par les liverpuldiens. Un certain effet psyché se dégage de l'ensemble et si le son se veut quasi-impénétrable, et ce dès le début de Family, Clinic s'ouvre à un semblant de luminosité, comme sur Animal/Human, en parvenant à maintenir un niveau très respectable.

C'est cependant les climats noirs que le groupe privilégie, Gideon démontrant cela tout en exposant des claviers aux nappes froides. La structure des morceaux reste simple et un air de Suicide flotte non seulement sur ce titre, mais aussi sur la plupart des autres. Sulfureux, exalté et sortant des sentiers battus, Clinic offre une alternative excitante et crédible au rock de cette décennie, qui de son côté ne livre plus grand chose de réellement original. Des morceaux courts comme Tusk sont animés d'une énergie punk dévastatrice et de guitares noisy délectables, et rompent quelque peu avec les titres ombrageux qui jalonnent ce Visitations, et une clarté bienvenue émerge de Paradise, le tout restant bien entendu dans un format au sein duquel l'allégorie domine. Et si on préfère souvent la formation anglaise dans ses moments les plus opaques (Children Of Kellog, imparable), celle-ci se diversifie en restant fidèle à sa ligne directrice initiale, comme sur If You Could Read Your Mind qui me fait penser au dernier Primal Scream, Beautiful Future, et même à leurs productions antérieures. Rien n'est à jeter ou même à négliger sur cet album qui confirme le statut du groupe, lequel s'offre même un temps acoustique sombre et pur sur Jigsaw Man et ses percussions dépaysantes, revenant ensuite à une électricité compacte. Enfin, Clinic se retranche pour finir en territoire usuel et connu sur The New Seeker, avant d'imposer une atmosphère plus posée, et plus "éclairée", sur Visitations, ceci en se montrant bien évidement parfaitement convaincant.

Voilà donc un groupe qui a su créer son propre style, l'imposer et le faire perdurer en l'affinant peu à peu jusqu'à composer des albums aboutis et singuliers, ce qu' est ce Visitations qui donne l'envie incoercible de continuer l'écoute et de se plonger, en ces temps ou la scène actuelle se retrouve dans l'impasse ou ne trouve son salut que dans les revivals en tous genres (parfois réussis, il faut le dire), dans le reste de sa discographie.
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TRACKLISTING:
1. Family
2. Animal/Human
3. Gideon
4. Harvest (Within You)
5. Tusk
6. Paradise
7. Children of Kellogg
8. If You Could Read Your Mind
9. Jigsaw Man
10. Interlude
11. The New Seeker
12. Visitations

Myspace CLINIC

Site CLINIC

vendredi 9 octobre 2009

Nodzzz - Nodzzz (2009, What's Your Rupture?)

Il y a des jours où l'on se sent chanceux, à la limite du privilège, et c'est un peu le cas pour moi ce soir. Ayant demandé à recevoir l'album de Music Is Not Fun, espoirs français à suivre de près, voilà que dans le même colis, je reçois le cd d'un autre espoir niçois de haute tenue, Quadricolor, et surtout, cet album d'un incroyable trio américain nommé Nodzzz.

Influencé, comme le dit sa page Myspace, par The SF Public Library, New York/New Jersey mental hospitals from the 50's and 60's, British New Wave singles from the 70's and 80's, California nude beaches. Nodzzz, etc... (tout un programme), Nodzzz balance, en dix titres et même pas seize minutes, un condensé impressionnant de vigueur rock rétro, mélodique et énergique à la Buzzcocks ou Pistols, superbement actualisé sans perdre de son "ancienneté". Brefs, sans fioritures, dotés de voix à la limite du punk et de guitares loquaces et mordantes, ces dix morceaux sont tout simplement des bombes rock et ce disque une bourrasque imparable, en même temps qu'une découverte retentissante. Entre In the city (protect high), léger et modéré et porteur de cette élégance passéiste irrésistible, Is she there? en ouverture, qui ferait pâlir de jalousie Pete Shelley et sa clique, ou ce Highway Memorial Shrine urgent, le trio constitué de Sean Paul Presley, Anthony Atlas et Eric Butterworth semble donner une leçon, entre autres, à une perfide Albion prisonnière de son passé et dont la scène commence à se mordre la queue tout en perdant de sa fraicheur et de sa spontanéité. Cette immédiateté, Nodzzz la possède et la maitrise au point d'en faire le fer de lance de son registre, j'en veux pour preuve, justement, Simple Song, qui comme son nom l'indique est d'une simplicité désarmante et d'une efficacité tout aussi renversante. C'est aussi le cas de Controlled Karaoke et es "lalalalala" addictifs, qui met fin à la face A (le trio a en outre décidé de partager son album en deux faces, à l'ancienne donc et comme sur les vinyls) avec bonheur.

Quant à la face B, elle est bien évidemment du même tonneau, d'autant que I have badnews et ses sifflements l'inaugure brillamment, suivi par Losing my accent, plus pop, valorisé par des mélodies dont Nodzzz garde jalousement le secret dans les recoins de sa matière grise. I can't wait enfonce ensuite le clou de ce rock qui m'évoque d'ailleurs le patchwork gentiment rétro qui fit du I Should Coco de Supergrass un classique quasi-instantané, dont une seule écoute permettait de rendre immédiatement compte de l'immense qualité. Qualité que l'on retrouve égale sur I was my parents vision, doté de choeurs aussi marquants que ceux de Controlled Karaoke, et sur City has no eyes, fonceur et porté par des riffs que tout rockeur digne de ce nom éprouverait une grande fierté à savoir jouer.

Super opus donc, et découverte aussi inattendue qu'éblouissante, dont la valeur, la fougue conjuguée à des mélopées mémorables, et la courte durée en font un indispensable à écouter des dizaines de fois en une seule et même journée.
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TRACKLISTING:
Face A;
1. Is she there?
2. Highway memorial shrine
3. In the city (contact high)
4. Simple song
5. Controlled karaoke

Face B;
1. I have bad news
2. Losing my accent
3. I can't wait
4. I was my parents vision
5. City has no eyes

Myspace NODZZZ

Site NODZZZ
A1: Is She There

Josh "Position Number Nine" (2009, My Mib Records/Swarm records)

JOSH nous avait déjà rassasiés avec un My Storm aux airs de référence noise, ce premier jet lui permettant de venir se placer en pôle position de la mouvance, aux côtés des Basement et autres Royal Mc Bee Corporation, ou encore d'Aghostino, autre formation au registre probant et sans failles. Voici donc venue l'heure du second effort et là, les Aquitains emportent la mise avec une aisance déconcertante, tant et si bien qu'on se demande, au final, pourquoi cette formation ne suscite pas un "buzz" plus conséquent dans notre pays si frileux en matière de prises de risques.

Des risques, Josh en prend -on peut le comprendre tant ses compétences et son savoir-faire le lui permettent- et débute d'ailleurs par une bourrasque noise, Position Number Nine, superbement ornée de mélodies constituant le parfait contrepoint de ce chant hurlé dont on raffole. L'équilibre est parfait, le son clair et massif à la fois, et le groupe place d'emblée la barre très haut. S'il se prétend et se reconnait noise, Josh possède en effet les qualités requises pour transcender le genre et lui amener un second soufle, ce que vient démontrer Not Starved Of You et ses brusques embardées noise assorties d'accélérations rythmiques bien amenées. Tout en maintenant une certaine tension, Josh fait respirer ses morceaux et livre une alternance "climatique" de bon aloi. Non content de cela, il pousse la démarche au morceau suivant, I.K.W.Y.W.H.M, lourd et qui, à l'image de leurs potes de Basement sur Everything Gets Distorted, s'offre des breaks mélodiques magistraux, de même qu'une "relance", basée sur une basse proéminente, tout bonnement renversante. La complémentarité dans le chant est d'ailleurs d'un apport conséquent et contribue à la diversité proposée, et cette variété, le titre suivant, Ocean of Sorrows, l'illustre de belle manière en imposant une trame presque cold. Mélancolique, reposant sur une atmosphère prenante et répétée, cette chanson entérine définitivement l'étonnante habileté de Josh à composer des morceaux qui, au delà de leur appartenance première à la noise, outrepassent celle-ci pour s'aventurer dans d'autres territoires en restant immanquablement captivants et performants. Sur le morceau qui suit, Want, c'est le registre post-hardcore qui est abordé et le côté massif puis galopant, ensuite étayé par un rythme débridé, qui prévaut, les cassures de rythme s'avérant aussi justes que précédemment. Puis sur Ambroise Amere, l'ambiance est à l'ambivalence entre chant crié et trame musicale plus légère quoiqu'assez intense, la basse amenant soudainement le morceau vers d'autres sphères, aidée en cela par des guitares remarquables.

La surprise, l'initiative, le refus de se cantonner à un style et à une démarche figés sont donc ici de mise et débouchent sur un album majeur, puissant et nuancé avec maestria. Et ce n'est pas le dernier morceau, un Gastroentéropode subtil dans son intro puis plus colérique, chanté en Français sans que cela ne dénote le moins du monde, qui démentira mes propos. Il y a dans ce titre du Virago, tant dans le texte que dans le climat lié à la chanson, l'album prenant donc fin sur une note aussi marquante que ce qui précède. Pas tout à fait cependant puisque passé ce titre, à moins qu'elles n'en soient partie intégrante, Josh nous gratifie de plusieurs minutes changeantes dans leurs humeurs, représentatives d'ailleurs de l'opus en présence de par la pluralité de leurs atmoshères.

Pour conclure et sans épiloguer, ce second jet confirme les espoirs que l'on pouvait placer en Josh et trouvera, le contraire serait incompréhensible, une place de choix au sein de la scène française. Ce qui serait la moindre des récompenses sachant qu'à l'écoute de ses travaux, le combo mériterait largement une reconnaisance plus étendue.
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TRACKLISTING:
1. Position number one
2. Not starved of you
3. I.K.W.Y.W.H.M
4. Ocean of sorrows
5. Want
6. Ambroisie amère
7. Gastroentéropode

Myspace JOSH

Site JOSH

TeTsuo - Cousu Main (2009, A Tant Rêver Du Roi)

Pau, une fois de plus. A Tant Rêver Du Roi, de même. J'avoue faire preuve d'un intérêt tout particulier pour ce collectif productif et inventif, adepte du DIY (Do It Yourself) et d'un travail sérieux et abouti tout en se voulant résolument décalé.

De cette démarche naissent des albums uniques en leur genre ( les derniers Kourgane et Sibyl Vane, entre autres et de façon non-exhaustive, loin s'en faut), dont ce Cousu-Main bien nommé n'est pas des moindres. Arnaud Millan et Alexis Toussaint, aidés sur ce disque par une kyrielle d'invités, dont Dawn Mc Carthy (Faun Fables) et Elyas Khan (Nervous Cabaret), pratiquent ce qu'ils définissent comme étant "un post-rock jazzy fait pour être hurlé dans un cabaret en flammes, théatre d'histoires plus stupides les unes que les autres". C'est en effet ce que l'on retrouve sur ce disque qui a pour particularité d'être leur premier sous une forme acoustique et retient notre intérêt du début à la fin, par le biais d'un éventail musical large et soigneusement élaboré.

Si l'on n'est pas éloignés, en certaines occasions, de l'émotion pure d'un Radiohead (Teeth And Bones), des envolées enfiévrées, dignes en effet d'un cabaret enfumé, sont à relever et donnent de la superbe à un disque déjà étincelant. C'est le cas par exemple sur A Door In A Skull, et l'on note qu'ici, à l'instar des autres productions ATRDR, chaque morceau possède un pouvoir de séduction, une accroche, loin d'être négligeable. Celui-ci se voit d'ailleurs accentué par la richesse instrumentale que permettent les intervenants; on retrouve par exemple une vielle à roue, des ondes Marthenot, un xylophone, un trombone ou du saxo, cette pluralité étant de toute évidence d'un grand apport. Chaleureux et dynamique, le son de TeTsuo envoûte et affiche un cachet particulier, se dotant d'envolées rageuses, comme sur Chirugical Chill, qui cependant ne se déparent jamais de l'émotion liée à la dizaine de morceaux de l'opus. Et c'est en effet bien à du Cousu-Main que l'on a droit, à un travail d'orfêvre minutieux et instinctif à la fois. Une forme d'excentricité sonore géniale (The Other) rend l'oeuvre de TeTsuo plus singulière encore, et l'on se délecte de cette multitude de sonorités délicates et enlevées, de ce chant "pluri-émotionnel", de ce parfait dosage entre douceur et révolte magnifiquement sonorisée. Dans un style saccadé et relevé par un cornet et un xylophone, Twisting Magnets captive lui aussi sans attendre, de même que The Day Pigs Will Fly, qu'on imagine plus encanaillé encore dans les conditions du live. Et pour finir, un titre court et lui aussi délicieusement excentrique, Gargantua, achève de faire de ce disque une pièce indispensable et sans réel équivalent dans son style.

Un incontournable de plus, donc, à l'actif du collectif palois...en attendant une suite dont on ne doute pas qu'elle sera de même teneur et dans le même esprit.
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TRACKLISTING:
01
Body Map

02
Teeth And Bones

03
A Door In A Skull

04
Bill's Men

05
Chirurgical Chill

06
UneTrappe Dans La Paume De La Main

07
The Other

08
Twisting Magnets

09
The Day Pigs Will Fly

10
Gargantua

Myspace TeTsuo

Site TeTsuo

?ALOS - Ricamatrici (2009, Bar La Muerte)

Après un premier album déjà bien barré, et des travaux de même teneur, c'est à dire expérimentaux et excellents, avec Allun et Ovo, Stefania Pedretti, aka ?ALOS, nous revient dans un esprit similaire sur ce nouvel album au concept original.
En effet, Stefania s'appuie sur l'évocation, sonore et textuelle, des métiers féminins, et cette fois, elle choisit d'aborder le métier de couturière. Partant de là, elle narre le voyage d'une couturière et ses différents moments forts, ce qui explique la présence d'interludes servant à différencier les lieux et les périodicités, et fait de ce nouvel opus un temps lui aussi marquant, frappé du sceau des expérimentations dont l'Italienne est friande et coutumière. C'est ici le piano qui domine les débats, allié à la voix aux tonalités variées, souvent très expressives, d '?ALOS. Et l'on passe d'instants relativement sereins (Tulle, cependant ombrageux, doté de ces sonorités qui font toute la sève de l'album tout en permettant à l'auditeur de situer les différents temps du récit, puis un Un Giorno complètement apaisé) à des plages autrement plus tourmentées (Ricami, obscurci par une voix...digne d'une sorcière et une trame musicale élégante mais crépusculaire, pessimiste dans ses sonorités). Il en va d'ailleurs ainsi tout au long du disque, changeant dans son tempérament et reflétant joliment l'habileté de Stefania à mettre en son, de façon adroite et hors-normes, des sentiments divers. Même les intermèdes, courts, exprimant cela avec brio.

On remarque d'ailleurs que c'est sur les moments les plus assombris (Punto Lacrima) qu'elle se distingue par une opposition remarquable entre son chant, presqu'enjoué, et une enveloppe sonore laissant augurer du pire, ce que confirme le morceau suivant, ce Puno Ombra au piano d'une noirceur affirmé, le chant appuyant ce ton à la limite de l'effrayant et, en tous les cas, captivant au possible. Par les climats qu'elle met en place, ?ALOS parvient à nous imposer des ressentis leur étant similaires, nous amenant à vivre son album avec une intensité proche de celle qui fut la sienne, sans aucun doute, au moment de l'écriture et de la composition. On prend ainsi peur sur Sartine, ce sentiment s'intensifiant ensuite sur La macchina da cucire, la voix menaçante et étonnamment évocatrice se mariant parfaitement avec les sons ténébreux du morceau. Ce tourment laisse ensuite place à une forme d'espoir sur Sospiri, sans toutefois que le morceau se dégage complètement de ce sentiment de malaise récurrent, puis sur Un’ora sola, cette lueur prend un peu plus d'ampleur, les retranscription sonores des sensations inhérentes à la narration s'avérant non seulement cohérente entre elles à l'écoute, mais aussi diablement atrayantes pour l'auditeur.

Cela ne surprend guère de la part d'?ALOS, dont le mérite, outre son esprit foncièrement expérimental, est de parvenir à raconter et exprimer avec, du début à la fin, un pouvoir d'attraction égal. La démarche s'achevant ici sur un Appunti di viaggio aux allures de voyage ferroviaire, comme un retour au bercail après un voyage fait, pour la couturière comme pour l'auditeur, de ressentis divers et contradictoires, et parfaitement traduit par cet album dont l'écoute révèlera à coup sur, au fil du temps, d'innombrables richesses.
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TRACKLISTING:
  1. Tulle
  2. Un giorno
  3. Ago e filo
  4. Ricami
  5. Punto intaglio
  6. Punto lacrima
  7. Punto ombra
  8. Sartine
  9. Punto croce
  10. La macchina da cucire
  11. Sospiri
  12. Un’ora sola
  13. Appunti di viaggio
Myspace ?ALOS

Site ?ALOS


jeudi 8 octobre 2009

KOURGANE "Heavy" (2008, Relax Ay Voo)

Abrité par le collectif palois A Tant Rêver du Roi, dont je ne me lasse pas de vanter l'esprit et les mérites, KOURGANE, groupe local, oeuvre, on pouvait s'en douter, dans une veine décalée, a-normale (et non pas anormale), et qui génère, à l'image de nombre de ses collègues de label, un résultat de grande valeur.
Si les bases de KOURGANE semblent, à l'écoute des premières mesures de Ovcara Sunflowers, se situer dans des sphéres noise, il est à noter que l'univers dépeint ici est fortement personnel, indénissable même. Et si le disque demende un effort d'adaptation, le jeu en vaut la chandelle tellement le produit fini s'avère bon. A partir de ce titre furieux, dément et saccadé tout en sachant se montrer plus direct, les palois élaborent des trames puissantes, usant aussi bien du Français que de l'Anglais, sur des textes semblant bruts dans ce qu'ils expriment, mais d'une qualité littéraire incontestable. On pense en ce sens à Virago, trio noise lui aussi lettré, la différence étant qu'avec KOURGANE, c'est à un son plus massif qu'on a droit (Virago était pourtant produit par David Weber, c'est dire la "massivité" du son de...Heavy, est-ce d'ailleurs un hasard si le groupe a nommé son disque ainsi?).
Tous les titres sont ici marquants et si le chant peut déranger au premier abord, on se prend très vite au jeu, comme sur l'incoercible Mariotte et finalement sur la totalité des morceaux. Les rythmes s'emballent, se font plus lourds, une basse groovy à souhait dynamise le tout, la voix agresse et captive tout en se montrant performante dans plusieurs registres. Et les guitares, affirmées et auteurs de riffs acérés, aportent leur contribution, et elle n'est pas des moindres, à ce tout fringuant. Il est d'ailleurs vain de chercher à distinguer tel ou tel titre, tous s'avérant être d'un niveau élevé, à l'image par exemple de ce Lounge lecture qui m'évoque Le Singe Blanc, excellent groupe messin, Kourgane faisant preuve, de surcroît, d'un belle maitrise instrumentale et "structurelle". Des gimmicks sonores enivrants (Morning Petimento) associés à la puissance de feu du quatuor font la différence et font d'une part de Kourgane un groupe précieux et délicieusement insubordonné, et d'autre part, de cet album une pièce maitresse d'une noise multiformes passionnante. Ecoutez donc ce Ce qui était prévisible impossible à endiguer, ou ce Conifères aux airs de Primus, doté de backing vocals affolés. Ou pour finir, un Chevreuil A presque funky en son début, mais façon Kourgane, c'est à dire assujetti à une forme de perversion, à une folie superbement mise en son, dans une lourdeur jamais dénuée de subtilité et truffé de bons plans musicaux et d'idée décisives à la pelle. On n'en ressort pas indemne et c'est exactement ce que l'on attend d'un album digne de ce nom. Kourgane nous l'offre sur ce Heavy génialissime, que je conseille à tout un amateur de rock sauvage et inspiré, à mille lieues des comportements par trop conventionnels d'une large frange de la scène "rock" de notre pays.
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TRACKLISTING:
1. Ovcara Sunflowers
2. Chemin Blanc
3. Mariotte
4. Coven Ambré
5. Lounge Lecture
6. Morning Petimento
7. Ce Qui Etait Prévisible
8. Conifères
9. Chevreuil A

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